Le Palais de la Virreina propose Autorretrato (Autoportrait), Alberto García-Alix, où le grand photographe espagnol donne à voir sa part la plus intime à travers une série d’autoportraits. À voir du 7 février au 5 mai 2013.
Le Palau de la Virreina propose Autorretrato (Autoportrait) – Alberto García-Alix, où le photographe espagnol donne à voir sa part la plus intime à travers une série d’autoportraits. Une manière de dire sa vie avec sa propre image mais aussi les lieux, les objets, qui ont dessiné son parcours. Une autobiographie imagée et poétique où la pudeur n’est pas exclue.
De l’intimité sans extravagances, Alberto García-Alix se définit comme une personne timide. Ses autoportraits ne sont pas dans l’air du temps où se montrer est souvent synonyme de désir de paraître autrement. D’éviter le dévoilement, la nudité totale. Où l’être s’efface au profit de l’apparence. Le photographe est à contre-courant, puisque, lui, choisit depuis la fin des années 70, de montrer qui il est en tant que personne avec tout ce que cela comporte d’intime. Une manière d’autobiographie photographique. Se représenter qui il est, comment se déroule sa vie, son quotidien, son entourage, les objets, les chambres, les appartements… etc. “J’ai commencé à faire des autoportraits par jeu, j’ai pris ma caméra et je me suis balancé vers la gauche, vers la droite, pour voir ce que cela donnerait sur une photo”, raconte le photographe lors de la présentation de l’exposition barcelonaise. Un “jeu” pour contrer peut-être el miedo, la peur, car Alberto García-Alix ne cache pas non plus qu’il est un grand angoissé et souligne dans un texte qu’il a écrit sur le sujet (Escondido en mi miedo) : “La peur nous accompagne tous, tout au long de notre vie.”
“Je n’ai pas photographié la Movida, je l’ai vécue”
Celui qu’on classe souvent comme LE photographe de la Movida madrilène réfute cette étiquette : “Je faisais simplement des photos de mon propre entourage… Je n’ai pas photographié la Movida, je l’ai vécue, en sortant dans les bars, en m’amusant. D’autres comme Miguel Trillo, eux, peuvent être considérés comme tel. J’aurais aimé avoir plus conscience de ce que vivait l’Espagne à ce moment là.” Au fil des 76 images et des deux films présentés ici, nous sommes invités à entrer dans la vie d’un homme. Sa passion pour la moto et son petit air canaille (Autoportrait avec moto, 1978), une photo de dos, cheveux gominés et perfecto comme une citation d’Elvis (Autoportrait de dos, 1978). Plus loin, il percute le regard avec cette photo où il est nu et solitaire devant une piscine où il vient de se baigner. Une piscine comme un réceptacle du passé, le cliché est légendé Un homme triste (2001). La vérité d’une vie. Les seringues, les amis perdus, les amours mortes et des secrets qui ne regardent que lui. Alberto García-Alix nous parle d’amour, il s’agit bien de cela. Surtout. Se mettre à nu, se dévoiler totalement mais avec pudeur toujours, le noir et blanc est là pour établir la distance. Depuis le début de sa carrière, le photographe utilise ces deux seules couleurs intransigeantes qui font et défont les ombres, le passé, le présent.
Autoportrait-autobiographie
Voir une fenêtre ouverte sur une cour, cette photo sublime titrée En attendant Pam (2000), c’est voir une poésie échappant à toute mièvrerie, à tout objet superflu. Et seul le sentiment, la sensation de l’attente sont dévoilés. Son bras tatoué et ses mains qui tiennent à bout de doigt un préservatif usagé prêt à être jeté… la fin d’une histoire (Une petite histoire d’amour, 1995). On regarde encore, parcourant les vastes salles du Palais de la Virreina, et c’est comme tourner une nouvelle page de l’autobiographie del señor. Les enveloppes décachetées des lettres où une femme a dessiné et écrit pour lui les mots des sentiments forts (Les lettres de Montse, 1987). Et puis, cette image troublante où Alberto García-Alix, couché sur des draps blancs froissés, montre une petite moitié de son torse, nu et presque glabre. Une main tendue posée sur la jambe d’une femme dénudée allongée à ses côtés et dont nous ne voyons pas le visage, il est écrit Autoportrait avec la femme que j’aime (1984). Une autobiographie où l’intimité est un secret révélé avec une grande maîtrise, un objet délicat raconté en noir et blanc.
© Corinne Bernard. Février 2013.
photos : © Alberto García-Alix
Autorretrato/Autoportrait, Alberto García-Alix, exposition visible du 7 février au 5 mai 2013, au Palais de la Virreina, La Rambla, 99. Barcelone. Du mardi au dimanche, de 12 h à 20 h. Entrée libre.
Catalogue d’exposition : Autoretrat/Self-Portrait, éditions La Fabrica.