Frantisek Kupka à  la Fondation Miro

Frantisek Kupka à  la Fondation MiroFrantisek Kupka, père de l’orphisme et l’un des maà®tres de l’abstraction, est exposé à  la Fondation Miro. Des toiles provenant du fonds du Centre Beaubourg et visibles jusqu’au 24 janvier. Derniers jours pour profiter d’une expo hors pairs.

Les météores de Kupka

Ce qui pourrait définir Frantisek Kupka (1871-1957), c’est la couleur, sa dextérité à  dominer la couleur. A juxtaposer le chaud et le froid, le bleu et le vert, à  provoquer les oranges et les ocres, les rouges et les bordeaux… une explosion délirante, iconoclaste reflétant la personnalité anti-conformiste de l’artiste d’origine tchèque. Les Météores de KupkaNé en 1871 en Bohême, dès 1889 il prend des cours de peinture historique et religieuse tandis qu’il gagne sa vie en exerçant le métier de… médium. Attiré par les sciences de l’esprit, les religions, il a fréquenté la théosophie et a souvent été à  contre-courant des idées de son époque. Un marginal. Il a aussi été l’un des précurseurs de l’abstraction avant Kandinsky. Kupka a inventé l’orphisme qui consiste à  privilégier la couleur ainsi que le circulaire au détriment du trait, c’est Guillaume Apollinaire qui lui choisit ce vocable. La collection proposée par la Fondation Miro provient des fonds du Centre Pompidou et retrace un itinéraire d’abord proche du symbolisme, puis plus abstrait au fil des ans. Une femme penchée vers un miroir se met du rouge, son visage est pâle, le rouge est vermillon, il explose. Ce tableau n’est pas encore de l’orphisme, on est bien dans le figuratif avec un visage proche de ceux que peignait Lautrec, Le Rouge à  lèvres (1908). La Gamme jaune, (1907) annonce son amour des couleurs vives, un homme assis, assoupi, il tient un livre entre ses mains, l’index marque la page qu’il était en train de lire. Comme son nom l’indique, toute la toile décline la gamme des jaunes. Les Météores de KupkaIl s’agit d’un tableau impressionnant en raison de cette variation de jaunes orangés et de l’impression de lumière irradiante qu’il procure. En 1910, il peint Le ruban bleu, une composition o๠les touches de couleurs encadrent une jeune femme en bleu (au rouge à  lèvres vermillon, toujours). Du vert, du bleu, du jaune, du rouge, Kupka n’a pas peur de mêler le chaud et le froid. Et ce qui a priori pourrait être une faute de nuance devient ici une juxtaposition osée (vert + bleu). Après tout, on est peut-être dans la nature, le bleu de la robe, le vert de l’herbe, pourquoi pas? On le voit bien, l’artiste semble se libérer des dogmes étudiés à  l’Académie de Prague ou lors de son séjour à  Vienne. Plus on progresse dans la visite, plus l’abstraction se précise, les couleurs jaillissent comme des geysers. Bouillonnement violet (1920) est en ce sens très représentatif d’une espèce de frénésie électrique guidant l’artiste vers un amoncellement de bordeaux, rouge, violet, orange, jaune, le tout bordé d’un vert bouteille. Cette peinture, tout comme Facture robuste, de la même époque, produit un impact mystérieux. On ne peut pas rester indifférent face à  ces deux oeuvres à  la fois dynamiques et voluptueuses. Formes rondes. Fumées. Volcans. Peu importe. Les Météores de KupkaNous sommes dans l’orphisme. Kupka, souligne ici qu’il n’a rien à  voir avec les formes du cubisme propres à  ses contemporains, lui, choisit l’éruption, l’éclatement de la ligne droite. Telles des météores, les couleurs déferlent du néant pour converger vers un seul point, une fuite (Autour d’un point et Lignes animées). En 1896, il est à  Paris. Pour gagner sa vie, il crée des affiches et des illustrations dans la revue anarchiste L’Assiette au beurre. Il poursuit son travail sur la lumière, thème récurrent de son oeuvre, visible notamment avec Disques de Newton, étude pour Fugue à  deux couleurs (1911-1912). O๠le soleil et le disque blanc de la lune semblent se fondre au milieu d’une mer formée d’autres cercles bigarrés. A la fin de sa vie, nous sommes dans les années 50, le trait graphique est à  la mode, Kupka semble suivre ce courant, c’est du moins ce qu’on perçoit à  travers Blanc autonome (1952). Il semble faire la nique à  Mondrian avec ses trois rectangles blancs s’alignant verticalement au milieu de la toile, posés sur des lignes bleues, rouges, et un trait noir. L’abstrait dans sa quintessence.

à© Corinne Bernard, décembre 09.

Exposition visible jusqu’au 24 janvier 2010, à  la Fondation Miro, parc du Montjuic. Mardi, mercredi, vendredi et samedi de 10h à  19h, le jeudi, de 10h à  21h30, dimanche et fêtes, de 10h à  14h30. Fermé le lundi.

Crédits photos : à  1) Autour d’un point 1911 – 1930, Huile sur toile,à Collection Centre Pompidou, Musée National d’Art Moderne. Acquisition de l’Etat, 1947à à© ADAGPà à© Collection Centre Pompidou. Photo : RMN/Jean-Claude Planchet. 2) Fleurà c. 1925, Huile sur toile,à Collection Centre Pompidou, Musée National d’Art Moderne. Acquisition, 1957. En dépà´t au Musée d’Art Moderne et Contemporain de la Ville de Strasbourgà à© ADAGPà à© Collection Centre Pompidou. Photo : RMN/Jacques Faujour 3) Disque de Newton, étude pour fugue à  deux couleurs 1911 – 1912, huile sur toile,à Collection Centre Pompidou, Musée National d’Art Moderne. Donation de Eugénie Kupka, 1959à à© ADAGPà à© Collection Centre Pompidou. Photo : RMN/ Tous droits réservés. 4) Plans par couleurs,à 1910 – 1911, Huile sur toile,à Collection Centre Pompidou, Musée National d’Art Moderne. Acquisition, 1957à à© ADAGPà à© Collection Centre Pompidou. Photo : RMN/Jacques Faujour. 5) Ruban Bleuà 1910, Huile sur toile,à Collection Centre Pompidou, Musée National d’Art Moderne. Acquisition, 1957. En dépà´t au Musée d’Art Moderne de Saint-Etienne-Métropoleà à© ADAGPà à© Collection Centre Pompidou. Photo : RMN/Yves Bresson.

Les Météores de Kupka

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