Take Shelter… apocalyptique

À l’affiche dès mercredi, Take Shelter, un drame sur l’angoisse de la fin des temps. Loin des super-héros, Jeff Nichols y dépeint une Amérique touchée par la folie de ses hommes. À ne pas manquer.

Remarqué au festival de Cannes 2011 et au Sundance Film Festival, Take Shelter est un de ces joyaux discrets du cinéma indépendant américain. Jeff Nichols y raconte une Amérique anxieuse, foudroyée par le chaos démarré avec les attentats de 2001. Révélation d’une Amérique fragile. Ici, le chaos s’en prend à la famille, berceau de l’American way of life, sous forme d’annonciation apocalyptique née dans la tête d’un père de famille en pleine crise existentielle. Take Shelter, mettre à l’abri, est le fil d’Ariane du film et l’obsession d’un homme persuadé que la fin du monde est proche. Ouvrier de chantiers de construction dans une Amérique modeste, une humble maison avec des champs à perte de vue, une femme belle et aimante qui vend ses broderies dans les marchés, et une fillette sourde-muette que l’on va opérer bientôt, jusque là tout va à peu près bien. Mais Curtis Laforche fait des cauchemars dans lesquels apparaissent les siens sous un orage destructeur, parfois il « pleut » même des oiseaux comme chez Hitchcock. Curtis est-il vraiment en train de rêver ? Est-il éveillé ? s’agit-il de prémonitions ? Le spectateur est sans arrêt baladé entre les cauchemars du héros et sa réalité, attiré vers cette psychose qui s’installe lentement dans la tête de ce père de famille.

L’Amérique brinquebalante

Jusqu’au moment où il se souvient de sa mère internée depuis l’âge de 30 ans pour schizophrénie. Il va la revoir, lui poser des questions auxquelles elle ne peut répondre. On pourrait en conclure que Curtis est bel et bien atteint d’un trouble psychiatrique. Persuadé qu’il est en train de devenir fou, il se laisse dépasser par cette angoisse de finir enfermé dans une institution. Il passe son temps à dire maladroitement aux siens son amour excessif… qu’il ne veut pas partir, s’éloigner de sa famille. Alors, il construit un abri dans le jardin, contre les tempêtes dévastatrices qui pourraient survenir et contre celles qui font trembler sa tête. Cet abris devient sa bouée de sauvetage, une frénésie salvatrice. L’espoir.

Une métaphore de la dégringolade de l’Amérique toute puissante ? de l’échec du modèle familial américain ? L’un des grands talents du cinéaste est de susciter le questionnement pendant tout le film et de parvenir à mettre nos nerfs en boule… Et LA question qui demeure encore après, cet abri pour sauver les siens était-il vraiment nécessaire ?…

© Corinne Bernard.

Take Shelter, un film de Jeff Nichols, avec Michael Shannon, Jessica Chastain, Tova Stewart. 120 mn. À l’affiche en Espagne, le 4 avril 2012.

 


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