La fondation Foto Colectania expose les photos de Leopoldo Pomés (Barcelone, 1931). À l’origine une commande de l’éditeur Carlos Barral qui n’a jamais vue le jour, ces 80 photos de la Barcelone de 1957 sont enfin visibles et proposées en même temps qu’un livre coédité par la fondation et La Fábrica. À voir jusqu’au 26 janvier 2013.
Barcelona 1957. Leopoldo Pomés est une magnifique promenade dans une ville de la fin des années 50 aux parfums éclectiques. Du Raval au Parallelo, des quartiers bourgeois de l’Ensanche (Eixample) à la populaire promenade de la Rambla, le jeune Leopoldo Pomés se promène toute une année avec son appareil photo pour croquer les différents visages de la capitale catalane. Il en résulte un univers superbe où l’on découvre une Barcelone passée. À des kilomètres de celle d’aujourd’hui. Une ville avec ses habitants, une atmosphère et une âme véritables. Des photos, de passants, de silhouettes et de visages, parfois volées où l’objectif du photographe est comme une antithèse de celui d’un Henri Cartier- Bresson dont les passants observent le plus souvent le viseur. Des bourgeoises à talons hauts et petite robe noire des quartiers chics, un homme solitaire en costume et chapeau clair traversant une immense place vide bordée de voitures, des adolescents jouant dans un terrain vague du quartier périphérique de Sant Andreu, des passantes sur la Rambla, des vendeurs ambulants du barrio Chino (Raval)… Ou encore ce jeune garçon dans la rue qui tient en paravent la Une de Solidaridad Nacional, quotidien phalangiste qu’il vient d’acheter. Des visages qui formaient une Barcelone multiple où l’on croisait la richesse mais aussi l’extrême pauvreté de ces années franquistes.
Leopoldo Pomés vouait à Barcelone des sentiments contraires, comme il le rappelle lui-même aujourd’hui : “J’en étais amoureux et à la fois je la haïssais. J’aimais et je détestais ce que je voyais dans les rues. Quand j’ai fait ces photos pour le livre, ce qui m’intéressait le plus était de capter l’atmosphère, ce qui se vivait au quotidien dans la ville, les silhouettes, les gens.” L’atmosphère de Barcelone en 1957, c’est ce que l’on ressent en regardant les photos de cette exposition, le plaisir, le bonheur de sentir un climat qui nous précipite dans ces années là. Années troubles et captivantes de Barcelone. Où l’on apprend beaucoup sur les Barcelonais de cette période en noir et blanc. Noir et blanc comme la Barcelone de deux mondes, celui qui avait gagné la guerre et l’autre, celui des perdants. Deux mondes évoluant dans des quartiers opposés. Et si les temps ont changé, si Barcelone n’a plus rien à voir avec les images de Leopoldo Pomés, elle conserve encore quelques ultimes volutes de son parfum original.
© Corinne Bernard, octobre 2012.
Exposition visible jusqu’au 26 janvier 2013 à la Fondation Foto Colectania, Barcelone (Julián Romea, 6 D2). Du lundi au samedi de 11 h à 14 h et de 16 h à 20 h. Fermé dimanches et fêtes. Ouvrage paru : “Barcelona 1957. Leopoldo Pomés” (éd. Foto Colectania – La Fábrica, 2012).
Photos : 1- Calle Balmes, 1958. Gelatina de plata, copia actual, 26×38 cm.© Leopoldo Pomés. 2 – La Vasquita, 1958. Gelatina de plata, copia actual, 18×34 cm. © Leopoldo Pomés, Colección Foto Colectania. 3 – Madre e hija, La Rambla, 1957. Gelatina de plata, copia de época, 19×29 cm. © Leopoldo Pomés.