Un nouvel album inclassable signé Enrique Seknadje
Si la première écoute surprend c’est qu’il s’agit de la marque de fabrique du musicien Enrique Seknadje qui nous avait deja étonné (et enchanté) en 2010 avec un premier album intitulé “Les Bleus de l’âme” et auquel avait participé le célèbre Mike Garson. Aujourd’hui, l’album s’appelle “Vers la joie”, autre ambiance. Ambiance est le mot qui définit aussi ce singulier opus, à travers ces huit titres qui conduisent lentement jusqu’au bonheur. La joie simple permise par la musique qui réchauffe les coeurs. Écouter “Vers la joie” et la retrouver, justement.
Bien que fan des années Glam portées par des Bowie ou des Marc Bolan tout en costumes étincelants et électricité, Enrique Seknadje nous embarque vers des contrées tout à fait personnelles et non imitées. Il ne cherche pas à refaire ce que d’autres ont marqué au fer rouge dans l’histoire universelle du rock. Non, il choisit de chanter en français, accompagné d’un son bien particulier et il serait vain de tenter de lui coller une étiquette. Alors nous écoutons plusieurs fois d’affilée chacune des plages pour en arriver toujours à cette même pensée : mais quel est donc cet objet sonore non identifié ?
Disque résolument plus optimiste que le précédent, il démarre pourtant avec des titres tels que “Suis si déstructuré”, “L’obstacle” et “Cette putain d’existence”… peut-être pour commencer par congédier les vieux démons que l’on pouvait entendre gémir dans “Les Bleus de l’âme”. Un début mélancolique distillé par “Suis si déstructuré” et “L’obstacle”. Et puis la lumière vient, les riffs, l’électrique, qui balancent bien avec la chanson “Cette putain d’existence”. Enrique Seknadje, on aime ou on n’aime pas, sa voix maniérée peut excéder une oreille trop conformiste… mais après tout, c’est ce qui fait l’originalité du chanteur. On sent bien qu’il ne souhaite pas faire comme ses pairs et qu’il navigue en dehors des modes. Alors, c’est sans doute en imaginant que l’on vit sur une autre planète qu’il faut écouter cet album composé tout en finesse avec çà et là quelques teintes glam-rock ou même électro-rock parfois, mais sans jamais abuser de rien.
On l’a dit au début, l’imitation n’est pas la règle ici, et cette partition rare a le charme de la nouveauté déconcertante. La mélancolie intime du début se termine dans la douceur des champs de cotons (“Mon été à tes côtés”, “Notre enfant”), tandis que le cinquième titre, réalisé avec le journaliste Eric Dahan, très rythmé, évoque Nietzsche et son Zarathoustra (“Solitaire élevé”). Le tribal “Force sauvage” parle des Indiens d’Amérique, de la liberté… L’album se referme comme promis sur la joie pure, authentique, avec un morceau qui s’intitule joliment et quasi religieusement, “Un chant joyeux”. Un objet musical heureux, à savourer.
© Corinne Bernard, septembre 2015.
L’album est en écoute ici : https://enriqueseknadje.bandcamp.com/album/vers-la-joie